Page, de Horseshoe Bend à Antelope Canyon

Si le nom de Page ne vous évoque rien, ne soyez pas étonnés. Cette petite ville située en Arizona passe facilement inaperçue et pourrait être l’un des secrets les mieux gardés de l’Ouest Américain. Pourtant, il suffit de se renseigner un peu ou de consulter Instagram pour se rendre compte qu’il s’agit d’un secret de polichinelle. Page est bien connue des touristes qui visitent la région, peut-être pas par son nom, mais bien par les trésors qu’elle abrite, à savoir Horseshoe Bend et Antelope Canyon.

C’est au cours de notre roadtrip automnal, qui nous a mené de Los Angeles à Monument Valley, que nous avons mis le cap sur Page. Nous venions de passer une longue journée au Grand Canyon, côté Nord, lorsque nous avons débarqué en ville. La nuit était déjà tombée et il a fallu attendre le lendemain pour que nous la découvrions. Autant le dire toute de suite, que ce soit de nuit ou en plein jour, Page n’impressionne pas vraiment. On s’imaginerait facilement cette petite ville au temps des cowboys, ses rues poussiéreuses balayées par le vent, les portes de ses saloon claquant en rythme…

Pourtant, il n’en est rien. Page n’a été fondée qu’en 1957, pour accueillir les ouvriers occupés à construire le barrage de Glen Canyon, sur le fleuve du Colorado. Il s’agit donc d’une ville récente, à vocation de cité dortoir, ce qui explique sans doute son manque d’attraits, à première vue. Pourtant, Page a perduré bien après la fin de la construction du barrage, sans doute grâce au nombre de touristes grandissant qu’elle s’est mise à attirer. Et on comprends vite pourquoi. Depuis 2009, la popularité d’Antelope Canyon est devenue de plus en plus importante, amenant chaque année plus de 200 000 touristes dans cette ville qui compte habituellement 8 000 habitants. Alors, faut-il avoir peur de la foule ou auriez-vous raison de prévoir la visite de Page, Horseshoe Bend et Antelope Canyon ?



Abonnez-vous sur Apple Podcasts | Abonnez-vous sur Android | Téléchargez le MP3

Dans ce douzième épisode de Partir Un Jour, nous passons en revue ce qu’il est possible de faire, en une journée ou deux, à Page, Arizona. Partir Un Jour, c’est le podcast voyage que j’anime en compagnie d’Aurélie, du blog Sauts de Puce. Chaque mois, nous y abordons une destination, de l’idée qu’on s’en faisait avant le départ à l’expérience sur place, en passant par nos coups de cœur et nos conseils d’itinéraire. Ce mois-ci, nous nous intéressons donc aux secrets de Page, à savoir Horseshoe Bend, Antelope Canyon, sans oublier un détour final par Monument Valley.

Arrêt à Horseshoe Bend

Horseshoe Bend se trouve un peu à l’extérieur de Page, à cinq minutes du centre-ville en voiture. On ne le remarquerait pourtant absolument pas s’il n’y avait pas un parking qui marquait son emplacement. De la route, on ne voit en effet rien d’Horseshoe Bend. Il ne nous a pas fallu tourner longtemps sur le parking pour y trouver une place, mais je me demande ce à quoi ressemble l’endroit en haute saison. Au moment de mon séjour, Horseshoe Bend était en effet un des seuls points d’intérêts complètement gratuit que nous avons visité durant notre séjour aux USA, du parking au point de vue en lui-même. Vu le nombre de touristes qui s’y pressent, ça ne pouvait pas rester longtemps comme ça et il faut maintenant payer un droit d’entrée de $10 pour pouvoir garer son véhicule.

Il faut marcher une bonne quinzaine de minutes depuis le parking pour atteindre le point de vue en lui-même. Si vous prévoyez de visiter Horseshoe Bend en été, prévoyez une bouteille d’eau car le chemin se fait en plein soleil. Une petite côte puis un long chemin de terre mènent à un promontoire de roche qui vous en met plein les yeux. De là, vous avez en effet une superbe vue sur Horseshoe Bend, cette courbe dans la Colorado River qui prend la forme d’un fer à cheval. Il est assez difficile de prendre la mesure du spectacle que cela représente – je sais que je ne me suis rendu compte du côté grandiose de Horseshoe Bend qu’en réalisant que le petit point blanc que je voyais sur la rivière était un bateau.

Une fois encore, même en étant en basse saison, j’ai été surpris du monde qu’il y avait et j’ai dû attendre mon tour pour pouvoir prendre LA photo tant attendue. Jusqu’à peu, il n’y avait aucune barrière qui séparait les visiteurs du vide (il y a quand même plus de 300 mètres entre le point de vue et la rivière en contrebas), chose qui a été récemment corrigée. Malgré tout, la barrière n’empêche pas les comportements dangereux et nombreux sont les touristes qui escaladent les rochers à proximité pour profiter d’une vue différente, au risque de glisser. Quand on voit le nombre d’accidents qui arrivent encore au Grand Canyon, ça ne présage malheureusement rien de bon…

L’arrêt à Horseshoe Bend ne demande pas plus d’une heure et peut même tout à fait être écourté pour repartir après 45 minutes, si vous êtes plus rapides que moi pour vous remettre de la vue sur cette étonnante formation naturelle.

Visiter Antelope Canyon

Il ne faut pas plus d’un quart d’heure en voiture pour aller de Page à Antelope Canyon. Se faisant, on rentre dans le territoire Navajo, puisque le site appartient à la tribu, qui le gère selon des règles strictes du gouvernement indépendant Navajo. Par exemple, il n’y a qu’une poignée de compagnies qui gèrent l’accès au Canyon, et elles sont toutes Navajo.

Quand on arrive à proximité du site, le lieu surprend, mais pas forcément par sa beauté. La silhouette d’une gigantesque centrale électrique s’impose dans le paysage, centrale qui était jusqu’à présent un des plus importants employeurs pour les Navajos mais qui va fermer dans l’année à venir. Autant dire que le poids qui repose sur les épaules des quelques bâtiments d’accueil qui font face à la centrale est grand. L’importance que prend le tourisme dans la vie des Navajos devient de plus en plus important à mesure que le nombre de touristes qui se presse à Antelope Canyon grandit… Un paradigme qui fait un peu peur.

Faut-il avoir peur du monde qui vient à Antelope Canyon ? C’était mon cas. Je ne craignais pas de ne pas avoir de place, puisque j’avais réservé mon entrée à l’avance (note au voyageur : si vous n’avez pas de ticket, vous allez sans doute faire le déplacement pour rien), mais bien de faire la visite dans de mauvaises conditions. J’avais lu des histoires de visites en groupe où le guide faisait avancer sa troupe au pas de charge et où chacun jouait des coudes pour prendre la meilleure photo… C’est la raison pour laquelle j’ai opté pour le Lower Antelope Canyon, a priori moins touristique. Il y a en effet deux parties d’Antelope Canyon qui peuvent se visiter, le Upper et le Lower. Il faut aussi savoir que les visites du Lower Antelope Canyon sont un peu moins chères et plus fréquentes.

Les visites se font uniquement accompagnées d’un guide Navajo. Dans mon cas, je me suis présenté une demi-heure avant l’horaire de la visite que j’avais réservé. Une fois sur le parking, j’ai appris qu’il allait falloir laisser mon sac à dos dans la voiture, ceux-ci étant interdits dans le Canyon, tout comme bon nombre d’accessoires (exit les perches à selfies). C’est donc uniquement avec mon appareil photo en main que j’ai attendu mon tour. Lorsque celui-ci est venu, les autres visiteurs et moi avons été répartis en cinq ou six groupes d’une quinzaine de personnes, qui sont partis les uns à la file des autres vers l’escalier de métal qui s’engouffraient entre les roches. L’idée de vous retrouver entassés dans un canyon étroit comme des moutons à la queue leu-leu ne vous fait pas spécialement envie ? Sur le coup, à moi non plus.

Mais une fois à l’intérieur, on oublie ces quelques désagréments. D’abord parce que les groupes circulent dans le canyon les uns après les autres, de manière à ce que personne ne se marche dessus. D’autre part, parce qu’Antelope Canyon est un lieu tellement unique qu’il vous plonge dans un état de stase, hors de la réalité. C’est en tout cas l’impression que j’ai eu. Aucun doute, le site est tout à fait à la hauteur de sa réputation et on reste ébahis de l’entrée à la sortie du canyon, à observer les jeux de lumière que créent les rayons du soleil en pénétrant dans la faille au dessus de nos têtes. Les formes que prennent les parois, sculptées par le vent et l’eau (Antelope Canyon est régulièrement sujet aux flash floods, ces inondations subites qui remplissent le canyon en une fraction de secondes) sont inattendues, surprenantes, au point qu’on ne peut s’empêcher de les caresser pour vérifier qu’on ne rêve pas. On y voit des visages, des animaux… On y voit ce qu’on y projette.

Car c’est vraiment un rêve que j’ai l’impression d’avoir vécu dans le Lower Antelope Canyon. Un moment unique, hors du temps, à errer les pieds dans le sable à la recherche de fantômes de lumière. On pourrait regretter que cet instant de magie ne soit pas mieux accompagné par le guide Navajo, qui partage malheureusement bien peu de choses sur sa culture et sur les mythes qui entourent le canyon, pour plutôt aider les touristes à prendre de plus belles photos. Un comportement qui répond sans doute à une certaine demande, la plupart des gens souhaitant ramener le meilleur souvenir de leur temps sur place, mais qui se fait à mon avis au détriment de l’expérience.


Faut-il visiter Antelope Canyon ? Oui, mille fois oui. Si j’ai par le passé été parfois déçu de l’engouement touristique qui entourent certains lieux mythiques (je vous renvoie aux Chutes du Niagara), ça n’a absolument pas été le cas pour Antelope Canyon. Ce sera peut-être amené à changer dans le futur, mais j’ai vraiment adoré l’heure que j’ai passé dans Antelope Canyon, au point que j’aurais voulu y rester plus longtemps, et je serai bien incapable de vous décourager de tenter, vous aussi, l’expérience.

Je recommande aussi chaudement le Lower Antelope Canyon, même si je n’ai aucun point de comparaison avec le Upper. Des photos que j’en ai vu, le Lower est visuellement aussi époustouflant que le Upper, avec les avantages que j’ai déjà cité.

Pour aller plus loin

De Page, vous êtes à 4 heures de route à peine de Monument Valley. Une paille ! Bon, si ce n’est pas grand chose à l’échelle des États-Unis, ça représente tout de même une sacrée trotte en réalité, et c’est à vous de voir si vous voulez dédier une demi-journée au trajet pour aller jusqu’à l’un des décors les plus célèbres des westerns américains. De mon côté, l’occasion était trop belle et j’ai donc roulé jusque là, sous la pluie et les gros nuages. Une ambiance assez particulière, puisque je n’avais jamais imaginé Monument Valley autrement que sous un soleil de plomb.

Tout comme Antelope Canyon, Monument Valley se trouve en territoire Navajo et il vous faudra payer un droit d’entrée distinct de celui qui donne accès aux parcs nationaux américains ($20 par véhicule en l’occurrence). Le ticket donne accès au parking du Visitor Center et à une route de terre qui vous fera passer au plus près des mesas, ces buttes caractéristiques de la région. Des Three Sisters à The Mitten, en passant par le John Ford’s Point ou l’Ear of the Wind, vous devriez avoir un bel aperçu de ces monuments naturels impressionnants.

Je parle au conditionnel car, dans mon cas, je n’ai pas pu aller plus loin que le Visitor Center. La pluie avait en effet transformé la piste en sables mouvants et, préférant ne pas y rester embourbé avec mon monospace, j’ai dû faire une croix dessus. La guide Navajo, à l’accueil, m’avait de toute façon déconseillé de m’y aventurer sans 4×4. Malgré tout, je ne regrette pas d’avoir fait la route jusqu’à Monument Valley, rien que pour la vue qu’il est possible d’avoir à partir du centre d’information. De là, on aperçoit la vue iconique de la vallée, avec les trois mesas les plus connues.

Le panorama laisse sans mot. A déambuler dans de tels paysages, on pourrait facilement se mettre à croire à des êtres surnaturels, qu’il s’agisse d’esprits ou de puissances divines. Plus qu’au Grand Canyon ou que dans n’importe quel autre endroit de notre roadtrip, je me suis vraiment senti tout petit à Monument Valley.

Plutôt que de repartir tout de suite vers le Sud, pour la fin de notre périple, nous avons poursuivi un peu sur la route 163, vers l’Est, pour rejoindre le Forrest Gump Point. Dans le film éponyme, Forrest Gump se met à courir et à traverser les États-Unis, jusqu’à s’arrêter finalement au beau milieu de la route. Cette route, c’est celle qui mène vers Monument Valley, qu’on aperçoit en fond. Un petit panneau indique l’endroit exact où le personnage incarné par Tom Hanks a arrêté sa course, et nombreux sont les touristes à venir poser au beau milieu de la route. Je me suis pour ma part contenté du panneau, un beau clin d’œil pour tout cinéphile qui se respecte.

Nous sommes ensuite repartis vers la partie Sud du Grand Canyon, en traversant une bonne partie du territoire Navajo. Un territoire qui est finalement assez vide et où les quelques villes rencontrées tiennent plus du regroupement d’habitations que de vraies cités dans lesquelles on aurait envie de flâner. Il suffit de faire un arrêt dans l’une d’entre elles pour se rendre compte de la réalité des Navajos : pas beaucoup de commerces, presque aucun loisir, et donc pas beaucoup de vie. Il est presque ironique de voir que les chaînes de Fast Food qui s’y sont implantées semblent être ce qu’il y a de plus animé.

Je serai reparti de ce coin des États-Unis avec l’impression d’y avoir vu des merveilles de trésors naturels mais aussi une réalité humaine moins reluisante. Ce qui illustre bien les multiples facettes du pays de l’Oncle Sam et la nécessité de le parcourir sans se limiter aux apparences.

Cité dans l’épisode :

  • Pour tout savoir de Horseshoe Bend ou du Lake Powell, rendez-vous sur le site du parc national Glen Canyon Recreation Area.
  • Le Upper Antelope Canyon.
  • Pour le Lower Antelope Canyon, vous avez le choix entre réserver votre visiter avec Ken’s Tour ou avec Dixie Ellis.
  • Le Monument Valley Tribal Park.
  • Pour vous loger à Monument Valley, si vous avez les moyens, il y a l’hôtel qui se situe directement dans le parc de Monument Valley, The View. Sinon, allez voir du côté de Kayenta ou de Mexican Hat.
  • Être dans 4 États des États-Unis au même moment, c’est possible (même si on ne l’a pas fait), en allant au Four Corners Monument.

Avec ce douzième épisode de Partir Un Jour, c’est la fin de notre passage en revue de notre roadtrip américain. J’espère que vous avez apprécié les six épisodes que nous lui avons dédié. Si c’est le cas, n’hésitez pas à vous abonner sur Apple Podcasts et à nous y laisser une évaluation ou quelques étoiles ! Vous pouvez aussi vous abonner via votre application de podcasting préférée sur Android avec le flux RSS. Enfin, s’il vous reste des questions, n’hésitez pas à me les poser en commentaire, ci-dessous.

A bientôt pour un nouvel épisode de Partir Un Jour !

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.