5 pièges à éviter à La Havane

Ce qui m’a marqué en premier en débarquant à La Havane, c’est son odeur. Une odeur d’essence, insidieuse, enivrante, que j’ai sentie dès la sortie de l’aéroport. Je n’ai pas eu le temps de chercher sa provenance : il fallait que je cède à des préoccupations d’ordre plus pratique. J’ai commencé par changer mes euros en CUC directement au bureau de change de l’aéroport, puis j’ai suivi mon chauffeur de taxi jusqu’à sa voiture, un vieux tacot russe. Direction : la vieille Havane !

Dès ces premiers pas à Cuba, je me suis rendu compte que le chemin serait pavé d’embûches, notamment parce que je ne maîtrisais pas du tout l’espagnol, mais aussi parce que le fossé culturel s’annonçait plutôt large. Mon trajet depuis l’aéroport m’aura coûté 30 CUC, quand on peut le plus souvent le payer 25 CUC. Je n’ai pas osé discuter le prix parce que le chauffeur avait été envoyé par la casa particular que j’avais réservé via Airbnb (et aussi parce que je l’avais fait poireauter pendant que j’échangeais mes euros).

Taxi à La Havane

Est-ce que j’aurais dû négocier ? C’est une des nombreuses questions que je me suis posé lors de mon voyage sur place. La Havane, comme toutes les grandes villes, possède de multiples facettes et j’ai parfois été un peu déçu par certaines d’entre elles. Ça ne m’a pas empêché de beaucoup apprécier mon séjour sur place, mais il y a plusieurs choses que je ferais sans doute différemment a posteriori.

Se limiter à la calle Obispo

Si La Havane se découpe en trois quartiers distincts, à savoir Habana Vieja (la vieille Havane), le Vedado et Miramar, je me suis surtout concentré sur la vieille Havane durant mon séjour sur place. Peut-être une erreur de ma part, mais il faut avouer que l’essentiel des attraits touristiques de la capitale de Cuba y est concentré.

La Havane

Prenez la calle Obispo : telle une colonne vertébrale, cette rue traverse tout Habana Vieja, ou presque. Elle est bien souvent décrite comme LA rue commerçante de La Havane, l’équivalent des Champs Élysées ! J’avais l’idée saugrenue d’y trouver le cœur et l’âme de Cuba. En pratique, il n’en fut rien. Il y avait plus de touristes dans cette rue que dans toutes celles dans lesquelles j’étais passé avant et tout m’y semblait moins authentique. Les boutiques étaient essentiellement à destination des touristes, avec les mêmes souvenirs d’un étal à l’autre.

Au fil de mes jours sur place, j’ai compris que la calle Obispo joue surtout un rôle de vitrine pour La Havane. Les paquebots de croisière qui y font escale pour la journée y débarquent leur cargaison de touristes (Américains notamment, lorsqu’il n’y a pas d’embargo) qui ne cherchent rien de plus que ce qu’offre cette rue : des souvenirs répondant à tous les clichés, des restaurants folkloriques, de la musique cubaine… Ceux-là n’iront jamais voir au-delà, ne s’intéresseront pas à l’Histoire de Cuba ou à sa culture.


Il pleut aussi à La Havane

Ce qui n’empêche pas la calle Obispo d’avoir ses qualités. Étonnamment longue, elle permet de relier le Castillo de la Real Fuerza et le front de mer au Capitole. C’est là aussi que j’allais régulièrement me réfugier lorsque la chaleur de l’après-midi se faisait trop pesante. Je rentrais dans l’hôtel Ambos Mundos, dans lequel Ernest Hemingway avait une chambre, pour monter jusqu’à la terrasse. Si je n’ai jamais pu visiter la chambre d’Hemingway, les horaires s’entêtant à ne pas s’accorder à mon emploi du temps, j’ai pris beaucoup de plaisir à y boire quelques mojitos ou, plus sobrement, des tukolas, en admirant la vue sur les toits de la ville.

Enfin, si vous cherchez une avenue de l’envergure des Champs Élysées, je vous conseille plutôt la promenade de la Paseo de Martí. On y trouve certes moins de boutiques, mais il y a souvent des artistes qui y vendent leurs œuvres (ce qui évoque plutôt Montmartre, on est d’accord). On y gagne en simplicité et en palmiers.

Les tours en voiture à côté du Capitole

Beaucoup de choses peuvent se faire à pied à La Havane, puisqu’encore une fois, l’essentiel des points d’intérêt se concentre dans Habana Vieja. Par contre, ça ne vous empêchera pas de vous faire héler à chaque coin de rue pour vous voir proposer un taxi, un bici-taxi (à vélo) ou un coco taxi (genre de tricycle, souvent motorisé). Mais même si vous aimez autant marcher que moi, vous pourriez être séduit par l’idée de parcourir la ville à bord d’une vieille américaine

Parque Centrale, La Havane

Cuba et les automobiles d’antan, c’est toute une histoire. Le véhicule qui m’a transporté depuis la gare avait le double de mon âge, j’ai roulé dans des voitures qui ne possédaient aucune ceinture de sécurité… voire de vitres latérales ! Mais les voitures américaines sont généralement bichonnées, telles celles qu’on retrouve sur la Parque Central, cette place en face du Grand Théâtre de La Havane, à côté du Capitole. C’est là qu’on trouve les belles voitures américaines des années 60 parfaitement alignées, attendant qu’un touriste ne vienne s’installer à l’arrière.

Là où ça se corse, c’est quand on s’intéresse au tarif. Il faut avouer que ça coûte assez cher, puisqu’il faut compter de 30 à 60 CUC (donc la même chose en euros) pour un tour d’environ une heure. Du simple au double donc, en fonction de la période et de la personne à qui on s’adresse. Là encore, je vous conseillerais de négocier. Je n’ai pas eu le courage (c’était mon premier jour sur place) alors que j’aurais pu simplement tourner les talons et allez voir ailleurs. Sans compter qu’il s’est mis à pleuvoir… La totale.

Notre carrosse

Est-ce que je déconseille totalement de faire ce tour en vieille américaine ? Pas du tout. Comme les bus touristiques hop on/off dans la plupart des grandes villes, c’est un moyen de voir l’essentiel des curiosités de La Havane en un minimum de temps. Mais c’est également intéressant pour aller jusqu’à des endroits hors de la vieille Havane, comme la fameuse Plaza de la Revolución.

C’est aussi l’occasion de parcourir le Malecón sur toute cette longue avenue qui borde l’océan, cheveux au vent. On pourrait résumer la balade en un concentré d’instants Kodak, à faire absolument si votre séjour à Cuba se résume à passer quelques jours à La Havane puis à prendre le soleil sur les plages de Varadero, par exemple.

Le Malecon, La Havane

Si par contre, vous cherchez juste à faire un tour en vieille américaine et que vous restez plusieurs semaines sur l’île, dites-vous que vous en ferez d’autre. Les occasions sont nombreuses, peu importe la ville où on se trouve, et les prix bien moins chers. De mon côté, j’en garde quand même un bon souvenir, malgré la pluie, peut-être parce que je découvrais comment les Cubains agrémentaient leurs automobiles de collections d’autoradios modernes, voire de lecteurs DVD intégrés.

Charité bien ordonnée…

Marcher dans les rues de la vieille Havane a quelque chose de spécial. Ses maisons sont colorées mais en décrépitude, son architecture se veut flamboyante mais tombe en ruine… Il faut reconnaître l’effort qui est fait pour essayer de conserver la beauté des maisons coloniales et pour ne pas défigurer la ville. Durant mon séjour, j’ai d’ailleurs croisé à plusieurs reprises des édifices en rénovations (à commencer par le fameux Capitole), des travaux qui paraissaient lents et de longue haleine. Il faut dire que le quartier est classé au Patrimoine Mondial de l’UNESCO et qu’on ne peut donc pas y bâtir n’importe quoi.

Rue de La Havane

C’est au lendemain de mon arrivée à La Havane, en faisant mes premiers pas dans ces rues, que j’ai eu mon premier contact avec le peuple cubain – si on omet mon hôte Airbnb et le chauffeur de taxi. Un homme d’un certain âge m’a abordé dans la rue et m’a demandé si je n’avais pas un peu d’argent à lui donner. J’avais justement quelques pièces dans ma poche et je n’ai pas hésité à les lui tendre. J’ignorais alors que ce type de rencontre, j’allais en faire une dizaine par jour. Un peu malgré moi, j’ai appris à refuser poliment ces sollicitations, n’ayant pas les moyens d’aider autant de gens.

Cette situation a conditionné l’ensemble de mon séjour à Cuba, au point que j’appréhendais presque de me faire aborder par les gens dans la rue, craignant qu’ils ne prennent mal mon refus. Je suis persuadé que ça a joué dans mon ressenti négatif de Santiago de Cuba. Si la situation est moins oppressante à La Havane, c’est un fait, la population est globalement pauvre et le niveau de vie, assez bas.

Notez qu’on ne m’a pas demandé que de l’argent. Si vous voulez aider le peuple Cubain, emportez dans votre valise des stylos, du savon ou des produits de soin… C’est la deuxième chose qu’on m’a le plus demandé. Je n’avais pour ma part qu’un vieux stylo à donner et l’habitant de La Havane qui y a eu droit n’avait pas l’air ravi de son cadeau… On ne peut pas faire plaisir à tout le monde.

Enfin, prenez garde aux gens qui veulent vous emmener boire un verre sous couvert de vous faire découvrir la culture cubaine. Ce sont bien souvent des traquenards pour, au mieux, vous retrouver avec une note salée à force de payer toutes les consommations. J’ai heureusement fait aussi de belles rencontres à La Havane, mais il faut avouer que cet aspect des relations humaines m’a poussé à être constamment sur mes gardes et a créé une distance supplémentaire avec les gens – à tort.

Le cimetière Christophe Colomb

Plutôt que d’aller visiter une fabrique de cigare (j’étais déjà allé visiter une ferme à Viñales), j’ai choisi d’inclure le Cimetière Christophe Colomb dans mes visites à La Havane. Forcément, étant un grand fan des promenades dans les cimetières, je n’allais pas rater l’un des cimetières architectoniques monumentaux les plus importants du monde. C’est aussi l’une des seules visites qui m’a fait sortir de la Vieille Havane, pour aller dans le quartier du Vedado, un peu à l’écart du centre-ville.

J’avais naïvement pensé m’y rendre en bici-taxi mais la distance était trop importante pour ce mode de transport. Pas de problème, le Cubain a qui j’ai posé la question m’emmène jusqu’à un de ses amis qui conduit un vrai taxi. Sauf que je me fais avoir comme au premier jour et quand il m’annonce le prix de la course, je ne discute pas, alors que je ne suis même pas sûr d’avoir bien compris. Résultat, le trajet en taxi m’aura coûté plus cher que bien des visites à La Havane… mais au moins, je serai arrivé à bon port.

Cimetière Christophe Colomb

Classé comme Monument National, la Necrópolis de Cristóbal Colón (en version originale dans le texte) était plutôt bien notée dans mon guide de voyage. L’entrée est payante, ce qui est assez rare pour un cimetière (mais assez répandu à Cuba) – comptez 5 CUC (l’équivalent en euros). Vu la taille du cimetière (56 hectares !), j’ai préféré prendre un plan (1 CUC), ce qui s’est finalement révélé une assez mauvaise affaire.

Le plan n’indique aucune des tombes importantes et si, comme moi, vous cherchez celle du domino ou celle du chien, vous allez être déçu. J’en suis venu à suivre un groupe de touristes qui faisait leur visite via un tour opérateur pour découvrir les tombes principales. Parmi elles, le Monument aux Pompiers qui date de 1890, assez révélateur de ce qu’on appelle l’art pompier, et surtout la Chapelle d’Amelia Goire de la Hoz, connue comme « La Milagrosa ».

La légende raconte que cette femme est morte après avoir accouché. Des années plus tard, ses restes ont été exhumé et le corps d’Amelia était intact, ce qui est un signe de sainteté selon la foi catholique. Plus surprenant encore, son bébé, qui avait été enterré à ses pieds, s’était retrouvé dans ses bras. À la suite de cela, La Milagrosa est devenu un lieu de recueillement et des milliers de pèlerins visitent sa tombe chaque année, notamment des femmes cherchant à tomber enceinte.




Dans les autres tombes répertoriées dans mon guide de voyage, il était question d’une sépulture sur laquelle reposait un jeu d’échec géant. Elle n’a pas été facile à trouver, mais après bien des péripéties, j’ai fini pour tomber dessus. Le résultat n’était pas du tout à la hauteur de mes attentes…

Mon conseil, si vous voulez absolument aller voir le Cimetière Christophe Colomb, est de ne pas prendre de plan, mais de garder quelques CUCs pour payer un des nombreux cubains qui jouent les guides à l’intérieur, de manière totalement officieuse. C’est votre meilleure chance pour trouver les tombes les plus intéressantes… pour peu que vous parliez espagnol. Lors de mon passage, aucun d’entre eux ne maîtrisait suffisamment l’anglais pour que ce soit intéressant.

Cimetière Christophe Colomb

Pour ma part, je me demande toujours si la visite en valait vraiment la peine. Entre le prix d’entrée, celui du taxi et le plan inutile, ça reste un des moins bons plans de mon séjour à La Havane. Enfin, petit détail qui compte, il n’y a pas de toilettes à l’intérieur… Quand on se promène au milieu de 56 hectares, ça peut avoir son importance.

Rester à La Havane

En discutant avec des touristes anglais rencontrés à Trinidad, j’ai eu une révélation. J’avais beaucoup aimé mon passage à La Havane, mais je n’y avais pas forcément trouvé tout ce que je cherchais. C’est en allant ensuite à Viñales, à Santa Clara et, surtout, à Trinidad (un véritable coup de cœur), en empruntant un taxi collectivo ou en me mettant à l’épreuve dans le parc de Topes de Collantes que j’ai eu l’impression d’expérimenter pleinement Cuba.

Habana Vieja

Par exemple, les visites sont moins nombreuses à La Havane que ce qu’on pourrait attendre d’une grande ville. Si j’ai passé tant de temps à l’hôtel Ambos Mundos à siroter des mojitos, c’est aussi parce que je n’avais plus aucun musée dans lequel me réfugier. Une fois évacué le fameux Musée de la Révolution, il ne reste finalement pas grand chose…

Si vous voulez vraiment découvrir Cuba, mon dernier conseil est donc de bouger et d’éviter de vous limiter à une seule ville – ou même d’y consacrer trop de temps. De mon côté, j’avais dédié cinq jours à La Havane, et ça s’est révélé être trop long. Je pense que j’aurais mieux gérer mon temps si je n’avais passé que trois jours sur place. Le cimetière Christophe Colomb serait peut-être passé à la trappe, mais l’aurais-je vraiment regretté ?




Quand je suis reparti de La Havane, l’odeur d’essence qui m’avait tant marquée à mon arrivée avait disparue. Elle s’était évaporée, ou peut-être m’y étais-je simplement habitué. Le taxi du trajet vers l’aéroport me coûtera 25 CUC, mais le chauffeur n’ayant pas de monnaie à me rendre sur les 30 CUC que je lui donnerais, je lui laisserais la différence. Pas grave… Ainsi va la vie à La Havane.

2 Replies to “5 pièges à éviter à La Havane”

  1. Salut Rémy,
    Merci pour ce superbe article. J’adore ta façon de rédiger. J’ai eu l’impression d’être transportée sur place.
    J’ai séjourné là-bas chez une locale durant une petite semaine (très court, je ne faisais qu’y passer depuis le Mexique). Je n’ai pas beaucoup voyagé à Cuba, mais j’ai appris énormément sur leur culture et la vie sur place, qui est assez particulière il faut bien le dire.
    Un grand merci, j’ai adoré lire cet article. Il faudra vraiment que j’y retourné pour visiter ce lieu sublime plus profondément.
    J’ai adoré la vidéo également. Court, simple, juste ce qu’il faut 🙂

    1. Salut Julie,
      Merci beaucoup pour ton commentaire ! C’est vrai qu’une semaine, c’est court, mais ça permet d’avoir déjà un bon avant-goût de ce qu’il y a à y découvrir…

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